Remarques préliminaires du surintendant Jeremy Rudin à la webémission de l’Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite (ACARR)
Le 13 mai 2021
Je remercie Ric [Marrero, chef de la direction de l’ACARR] et l’Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite de m’avoir invité ici aujourd’hui.
À titre de surintendant des institutions financières, mon travail consiste principalement à me préoccuper… à me préoccuper de ce qui pourrait mal tourner.
C’est pourquoi le BSIF fait tant d’efforts pour prendre des mesures proactives dont le but est de prévenir et d’atténuer les répercussions financières possibles dans le sillage de crises affectant le secteur financier. Heureusement, ces mesures ont été utiles tout au long de la période de turbulence qu’est la pandémie de COVID-19.
Je tiens à préciser qu’être proactif ne signifie pas être devin. Comme je le dis parfois, nous sommes dans le domaine de la prévention, nous ne sommes pas des prévisionnistes.
Le BSIF tire parti de son pouvoir législatif pour veiller à ce que les organisations qu’il surveille comprennent et gèrent convenablement les risques actuels et possiblement à venir. En bref, nous mettons l’accent sur la prévention des préjudices financiers qui pourraient affecter les participants d’un régime, et ce, en faisant la promotion d’une gestion et d’une planification robustes du risque.
Dans cet esprit, nous nous attendons à ce que les régimes de retraite mettent en place des mesures qui soutiennent la résilience, comme des portefeuilles de placement suffisamment diversifiés et prudents, des stratégies qui tiennent compte du risque de longévité et des changements démographiques, des plans solides de continuité des activités et des mécanismes de défense contre le cyberrisque.
Vous m’avez invité ici pour parler de thèmes de grande envergure, ce qui est tout à fait compréhensible dans le contexte de l’année que nous venons d’avoir. Je suis ravi de pouvoir m’entretenir avec vous, dans l’optique de mon rôle de surintendant des institutions financières et du mandat du BSIF.
Commençons par jeter un coup d’œil aux pratiques des régimes de retraite en matière de gestion du risque. Nous remarquons que de nombreux régimes de retraite à prestations déterminées élargissent l’éventail de leurs placements et adoptent des approches d’investissement plus complexes.
Évidemment, le contexte actuel de faibles taux d’intérêt est un facteur important qui influe sur cette tendance, qui a d’ailleurs été renforcé par l’approfondissement des marchés privés, le recours accru aux techniques complexes et l’offre en hausse de « placements alternatifs ».
Cette complexité accrue signifie que les pratiques de gestion du risque d’investissement sont aussi sous la loupe comme il se doit pour que les administrateurs de régimes puissent répondre aux obligations législatives et fiduciaires qu’ils ont envers les participants aux régimes.
Nous sommes d’avis que le fait de mettre l’accent sur la gestion prudente du risque d’investissement donne le ton en ce qui a trait à la gestion du risque dans le secteur des régimes de retraite et l’aide à se préparer à faire face aux chocs et aux événements néfastes possibles à venir.
C’est pourquoi la Division des régimes de retraite privés du BSIF se penche depuis un an sur les placements des régimes de retraite avec le soutien de nos experts de la surveillance des banques et des sociétés d’assurance. Nous avons trouvé très utile de regrouper un large éventail de points de vue et d’expériences dans le cadre de nos travaux sur les régimes de retraite.
Nous travaillons à l’heure actuelle sur un cadre réglementaire de gestion du risque d’investissement et de gouvernance du risque à l’intention des régimes de retraite qui s’appuiera sur ce que nous avons appris grâce à cet examen collaboratif. Je m’attends à ce que nous puissions vous en dire davantage plus tard cette année.
Maintenant, tournons-nous vers les risques liés aux changements climatiques et parlons-en de façon détaillée. Pour être clair, le rôle du BSIF en matière de risque climatique n’est pas différent de son rôle face à tous les autres risques qui affectent les régimes de retraite : il veille à la sécurité des prestations des participants par l’administration de la législation conçue à cet effet.
C’est dans cette optique que le BSIF publié un document de travail sur le risque lié aux changements climatiques dans le secteur des finances. On y présente des idées préliminaires sur l’approche que pourraient adopter les institutions financières et les régimes de retraite en matière de risque climatique dans le but d’encourager l’échange d’idées.
Dans le cas des régimes de retraite, on y met l’accent sur les répercussions que pourraient avoir les changements climatiques sur les portefeuilles de placement des régimes de retraite, notamment le risque de transition à une économie plus verte. Tout cadre lié au risque climatique à l’intention des régimes de retraite que proposera le BSIF sera conçu en gardant ce contexte en tête.
Les administrateurs de régime de retraite ont l’obligation fiduciaire d’investir prudemment et dans le respect des intérêts des participants au régime. Nous croyons qu’il est absolument impératif, conformément à cette obligation fiduciaire, de tenir compte des risques climatiques qui pourraient se répercuter de façon importante sur les risques et les rendements des placements.
Dans le cas des régimes de retraite, j’estime que ce sont les risques de transition qui représentent le risque le plus important. Ces risques découlent surtout des changements de politiques dont le but est de réduire considérablement (sinon d’éliminer) les gaz à effet de serre dans l’activité économique. Cela dit, même face à ces risques, le recours à des stratégies d’investissement passives pourrait encore être approprié pour des régimes de retraite dans certaines circonstances.
Nous nous penchons aussi sur le choix et la conception des régimes de retraite parrainés par un employeur. En tant qu’organisme de réglementation prudentielle, nous avons tendance à mettre l’accent sur les régimes à prestations déterminées parce que les lois que nous appliquons prévoient des exigences exhaustives à leur égard.
Mais nous reconnaissons que les Canadiens qui ne participent pas à un régime à prestations déterminées méritent tout autant de pouvoir compter sur une structure solide quant à leur retraite. D’autant plus que toute la croissance en fait de participation à un régime de retraite agréé au cours des dernières années a été enregistrée dans les régimes à cotisations déterminées.
C’est pourquoi le BSIF et l’Autorité ontarienne de réglementation des services financiers (l’ARSF) ont établi un comité consultatif technique à vocation spéciale en décembre dernier dans le but d’améliorer les résultats des régimes à cotisations déterminées. Nous étudions les options pour gérer les principaux risques associés aux régimes à cotisations déterminées, pour réduire le fardeau réglementaire et pour élaborer une approche réglementaire actualisée à l’intention de ceux-ci.
Comme la plupart des membres du comité consultatif sont d’avis que les régimes à cotisations déterminées offrent de meilleurs résultats aux participants en fait d’épargnes pour la retraite que les options non agréées, par exemple les REER collectifs, le BSIF et l’ARSF se demandent s’ils peuvent agir dans l’exercice de leur mandat de façon à améliorer la situation des régimes à cotisations déterminées et à les rendre plus attrayants pour les participants et les employeurs.
Vous trouverez plus d’informations sur ce comité et les résumés de ses réunions à la page sur les régimes de retraite du site Web du BSIF.
Alors que je me préparais à venir ici, on m’a demandé si j’avais des mots de la fin pour le secteur des régimes de retraite. Je me suis rappelé les conseils que m’ont donnés les personnes qui ont occupé le poste de surintendant des institutions financières avant moi.
L’un d’eux m’a dit que « quelque chose » allait inévitablement arriver au cours de mon mandat, que je ne saurais pas ce que ce « quelque chose » serait et qu’il n’y aurait sûrement pas d’avertissement à l’avance.
Je vous offre le même conseil : « quelque chose » va arriver, quelque chose que vous ne pouviez raisonnablement pas prévoir.
Vous ne saurez pas ce que cet événement sera. Ses caractéristiques et son ampleur demeureront un mystère jusqu’à ce que vous atteigniez son apogée. Mais vous pouvez vous y préparer. Prenez les mesures nécessaires pour atténuer les risques et les répercussions de « l’inconnu ». Simulez différentes crises pour mieux comprendre ce qui
pourrait arriver. Adoptez des pratiques et des politiques solides pour veiller à la continuité des activités et à la protection des prestations des participants.
Merci.