Participation du surintendant, Peter Routledge, à un entretien informel au Sommet 2025 de l'Institut du risque mondial
Discours - Toronto -
L’allocution prononcée fait foi
Animatrice :
Vous avez dit que le BSIF cherche à réduire le plus possible le fardeau réglementaire. Pouvez-vous nous donner des exemples concrets de domaines dans lesquels c’est possible de le faire, tout en maintenant la résilience?
Surintendant – Peter Routledge :
- Le 18 août, j’ai expliqué que nous continuons de nous imposer une discipline fondée sur l’efficacité de la réglementation : nous allégeons la portée et le calendrier de certains appels de données sur l’intégrité et la sécurité; nous modifions la consultation sur la gouvernance d’entreprise pour mettre l’accent sur les questions les plus importantes; et nous éliminons les exercices de collecte de données redondants. Ces changements permettent de libérer des ressources sans compromettre la résilience.
- Sur le plan de la surveillance, nous décidons de l’étendue des activités de manière plus mesurée. La surveillance du risque opérationnel n’est pas chose facile, loin de là, mais nous rajustons la manière dont nous intervenons et dont nous classons les institutions à un stade d’intervention afin que notre encadrement soit adapté au profil de risque, plutôt que d’appliquer la même approche à toutes les institutions.
- Pour ce qui est des fonds propres, nous apportons des ajustements ciblés. Nous avons mis en pause l’application des réformes de Bâle III afférentes au « plancher d’actifs pondérés en fonction du risque » pour veiller à ce que l’équilibre concurrentiel soit préservé pour les banques canadiennes qui exercent leurs activités au sein du système bancaire mondial, et pour donner de la prévisibilité et de la transparence aux banques nationales à l’égard de nos attentes en matière de fonds propres.
- Toutefois, nous n’assouplissons pas les règles partout. Citons par exemple la lutte contre le blanchiment d’argent, un domaine où l’environnement de risque continue d’imposer une réglementation plus stricte.
Animatrice :
Vous avez dit que la lutte contre le blanchiment d’argent était une question d’ordre prudentiel. À quel point cette question vous préoccupe-t-elle en ce moment, compte tenu de la Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière (projet de loi C-2) à l’étude et de l’examen par le Groupe d’action financière (GAFI) prévu d’ici la fin de l’année? Qu’est-ce qui va changer dans la façon dont le BSIF surveille cette question?
Surintendant – Peter Routledge :
- La lutte contre le blanchiment d’argent est effectivement un risque prudentiel. Des mécanismes de contrôle déficients peuvent miner l’intégrité et la confiance, ce qui menace ensuite la sécurité et la solidité du système. C’est pourquoi nous traitons la lutte contre le blanchiment d’argent sous l’angle des risques liés à l’intégrité et à la sécurité, et que nous la considérons comme une priorité dans notre Regard annuel sur le risque.
- Soulignons qu’aucun autre organisme de réglementation n’a pour mandat de veiller à ce que les institutions financières fédérales (IFF) disposent de politiques et de procédures pour se protéger contre les menaces pesant sur leur intégrité et leur sécurité, et contre l’ingérence étrangère.
- Notre équipe de l’Intégrité et de la Sécurité nationale collabore étroitement avec les différents interlocuteurs du milieu de la sécurité intérieure et du renseignement ainsi qu’avec nos homologues internationaux pour déceler les menaces qui pèsent sur les IFF. En rassemblant des informations classifiées et non classifiées, notre équipe peut obtenir une vue d’ensemble des risques liés à l’intégrité et à la sécurité auxquels font face les institutions. Et ceci comprend l’influence exercée par des États étrangers.
- Le projet de loi C-2 permettra de renforcer la coordination. Si la loi est adoptée, le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE) siègera au Comité de surveillance des institutions financières (CSIF). Je serais d’ailleurs ravi d’accueillir le CANAFE à cette table. L’échange d’informations s’en trouvera facilité, et nous pourrons réagir plus rapidement sur le plan de la surveillance.
Animatrice :
À quel point les mesures prises par le BSIF sont-elles influencées par ce qui se passe au sud de la frontière, en particulier la tendance à la déréglementation observée aux États-Unis?
Surintendant – Peter Routledge :
- Le système financier canadien traverse une période de profonde incertitude. De l’instabilité géopolitique croissante aux cybermenaces en passant par les changements climatiques et les mutations de l’économie nationale, les institutions financières doivent composer avec un ensemble de risques substantiels et complexes. Le Canada étant une puissance économique nord-américaine, nos banques et nos assureurs sont en concurrence sur le marché des États-Unis, et nous ne pouvons donc pas ignorer l’évolution de l’environnement réglementaire de nos voisins.
- Ces 15 dernières années, l’action du BSIF a permis de renforcer durablement la résilience du système financier canadien. Ces efforts se sont avérés à la fois nécessaires et efficaces. De fait, cette résilience représente aujourd’hui un avantage stratégique dont il faut tirer parti pour soutenir la croissance de l’économie canadienne. Pour autant, il n’est pas question de s’écarter de notre mandat fondamental, mais plutôt de l’élargir de manière audacieuse. Un système financier solide et stable, ce n’est pas seulement une mesure de protection, c’est un catalyseur de la prospérité nationale.
- Au BSIF, nous nous sommes imposé une discipline annuelle consistant à améliorer nos lignes directrices et préavis en cherchant des possibilités d’éliminer les activités qui représentent un fardeau inutile. Nos priorités sont claires : réduire le fardeau réglementaire dans la mesure du possible, mettre davantage l’accent sur les risques les plus importants et voir à ce que les institutions demeurent résilientes dans un monde incertain.
- Nous nous adaptons quand c’est nécessaire. Par exemple, l’an passé, nous avons mis en pause les augmentations du niveau du plancher d’actifs pondérés en fonction du risque de Bâle III, parce que l’écart avec nos homologues à l’international, dont les États-Unis, était devenu trop important pour être acceptable. Il fallait que les conditions de concurrence restent équitables sans menacer la résilience.
- En mettant résolument l’accent sur la solidité du système financier, l’innovation et la confiance du public, nous continuerons de soutenir le rôle central que jouent les institutions financières canadiennes dans la vitalité économique du pays.
Animatrice :
Si la déréglementation s’accélère aux États-Unis et que l’effet des droits de douane commence à se faire davantage sentir, que fera le BSIF pour maintenir la compétitivité du Canada sans pour autant modifier sa position face au risque?
Surintendant – Peter Routledge :
- Nous agirons en amont. Vous pouvez vous attendre à ce que nous intervenions rapidement et à ce que nous ne restions pas dans l’attente. Lorsque l’environnement de risque évolue, nous nous plaçons dans une perspective d’avenir, nous anticipons et nous adaptons notre approche avant que les institutions canadiennes ne se retrouvent désavantagées.
- Notre démarche est progressive. Nous apportons des changements par étapes, pas de manière brutale et soudaine. Ainsi, les conseils d’administration et les dirigeants des institutions comprennent bien les changements apportés et ont le temps de s’adapter, et la sécurité du système peut être maintenue.
- Un système financier solide et stable, ce n’est pas seulement une mesure de protection, c’est un catalyseur de la prospérité nationale. Le système financier canadien repose sur la résilience, et cette résilience est un atout stratégique.
- Nous agissons avec prudence. Que ce soit en réponse aux droits de douane ou aux mesures de déréglementation aux États-Unis, vous pouvez vous attendre à des mesures prudentes, des mesures qui protègent les déposants et les titulaires de police tout en permettant aux institutions de soutenir l’économie canadienne en période d’incertitude.
Animatrice :
Que fait le BSIF pour aider les petites et moyennes entreprises à accéder au capital dont elles ont besoin pour se développer?
Surintendant – Peter Routledge :
- Nous cherchons constamment des moyens d’adapter au mieux les exigences de fonds propres au risque réel. Une réglementation efficace permet de réduire les contraintes inutiles qui s’exercent sur les fonds propres, sans compromettre la sécurité et la solidité du système, et de soutenir la compétitivité des institutions financières si nécessaire. Ceci permet de libérer des ressources que les banques peuvent utiliser pour octroyer plus de crédits.
- De manière plus générale, nous nous concentrons autant que possible sur l’efficacité de la réglementation en dirigeant notre action sur les risques prioritaires et en veillant à ce que les institutions demeurent résilientes dans un monde incertain. Nous nous sommes imposé une discipline annuelle consistant à améliorer nos lignes directrices et préavis en cherchant des possibilités de rendre la réglementation plus efficace.

Peter Routledge, surintendant du BSIF (gauche), Sonia Baxendale, présidente et chef de la direction, Institut du risque mondial (right) au Sommet 2025 de l'Institut du risque mondial.