Réponses du BSIF aux commentaires reçus dans le cadre de la consultation initiale sur les mesures de remboursement de la dette

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Type de publication
Réponse à la consultation
Catégorie
Saines pratiques commerciales et financières
Date
Secteur
Banques,
Succursales de banques étrangères,
Sociétés de fiducie et de prêts,
Sociétés des assurances multirisques,
Sociétés d'assurance vie et de secours mutuels
Table des matières

Le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) publie aujourd’hui les résultats et les prochaines étapes de sa consultation publique initiale sur la ligne directrice B-20, Pratiques et procédures de souscription de prêts hypothécaires résidentiels, qui portait plus précisément sur les mesures de remboursement de la dette.

Nous remercions tous ceux qui ont fourni une rétroaction au document de consultation paru en janvier 2023. Un sommaire anonyme de la rétroaction et nos réponses figurent ci‑après. Nous sommes heureux de la diversité de la rétroaction fournie par un large éventail d’intervenants, qu’il s’agisse d’acteurs des secteurs des services financiers, du courtage hypothécaire ou de l’immobilier ou de membres du grand public.

La plupart des intervenants conviennent que les risques pour les prêteurs découlant du fort taux d’endettement des ménages sont importants. Pourtant, de façon générale, ils ne sont pas en faveur de mesures supplémentaires de remboursement de la dette. Bon nombre d’entre eux ont proposé des mesures de remplacement ou des modifications à nos propositions, que nous avons examinées de près. L’une des principales préoccupations est l’impact que de nouvelles mesures pansectorielles pourraient avoir sur des institutions de plus petite taille au modèle d’affaires unique.

Comme nous l’avons indiqué dans le cadre de la consultation, le taux admissible minimal (TAM) a contribué à la gestion du risque lié au remboursement de la dette, surtout avec la flambée des taux d’intérêt hypothécaires. Toutefois, comme mentionné, nous croyons que des mesures supplémentaires sont nécessaires pour atténuer la vulnérabilité sous‑jacente d’emprunteurs lourdement endettés de plus en plus nombreux.

Nous mettrons donc en place des mesures de surveillance ciblées afin de limiter l’exposition d’une institution financière fédérale (IFF) donnée à l’endettement élevé des ménages au fil du temps. Ces mesures tiendront compte de la taille, de la nature, de la complexité et du profil de risque de chaque IFF, en plus de concilier une saine gestion du risque et la nécessité pour les IFF d’exercer une concurrence efficace et de prendre des risques raisonnables.

Comme l’indique notre Regard semestriel sur le risque, nous continuerons d’examiner nos attentes à l’égard des prêts garantis par des biens immobiliers en 2023‑2024.

Réponses aux commentaires reçus dans le cadre de la consultation

Restrictions du ratio prêt-revenu (RPR) et du ratio dette-revenu (RDR)

Commentaires

De façon générale, les répondants n’appuient pas ces mesures proposées, estimant qu’elles :

  • feraient double emploi avec les outils existants (coefficients d’amortissement brut de la dette [CABD] et d’amortissement total de la dette [CATD], etc.);

  • seraient insensibles aux facteurs pertinents de service de la dette (taux d’intérêt, actifs de l’emprunteur, etc.);

  • affecteraient démesurément les prêteurs de plus petite taille;

  • corrigeraient des tendances qui se sont déjà concrétisées et ont évolué depuis;

  • seraient peu associées au risque de défaut.

Solutions de rechange proposées

Certains répondants ont offert des solutions de rechange ou des recommandations de mise en œuvre :

  • Au lieu de limiter le RPR ou le RDR, le BSIF pourrait suivre leur évolution à la lumière d’autres changements du cadre réglementaire actuel. Pour faciliter cela, le secteur pourrait déclarer ses paramètres du RPR/RDR.

  • Si la mesure est adoptée, le BSIF devrait utiliser une tranche d’exception plus élevée que celle proposée (30 % à 33 %, p. ex.) afin d’atténuer l’impact sur les acheteurs d’une première maison et le risque de migration vers des prêteurs non réglementés.

  • Autre solution : le BSIF pourrait limiter l’exposition du portefeuille total d’un prêteur aux prêts à RPR/RDR élevé (10 %, p. ex.) et prévoir une limite plus élevée pour les prêteurs de plus petite taille (20 %, p. ex.).

  • Le ratio prêt‑valeur (RPV) devrait influer sur les seuils et l’étalonnage du RPR de manière que les prêts dont le RPV est moindre bénéficient de limites d’exception plus élevées.

Réponse du BSIF

Nous reconnaissons que, dans certaines circonstances, les coefficients d’amortissement de la dette (CABD et CATD) peuvent produire des résultats similaires à ceux du RPR/RDR bien qu’ils ciblent l’abordabilité de la dette au lieu de limiter l’exposition à un niveau d’endettement élevé. Nous convenons aussi que la plupart des prêteurs n’utilisent pas de mesures du RPR/RDR aux fins de souscription.

À notre avis, la crainte que le RPR et le RDR soient moins détaillés et insensibles aux taux d’intérêt et à d’autres facteurs constitue un éventuel avantage puisqu’ils sont conceptuellement explicites. Nous considérons le RPR et le RDR comme des mesures plus simples qui pourraient limiter les niveaux élevés d’endettement des ménages de façon globale ou à l’échelle du portefeuille, ce qui atténue le risque lié au service de la dette en ciblant plus directement la vulnérabilité sous‑jacente. Nous estimons qu’une restriction du RDR (endettement total) est trop complexe à mettre en œuvre pour le moment. Nous croyons aussi que la mise en œuvre proportionnelle, plutôt qu’une approche unique, conviendrait le mieux compte tenu des différences entre les modèles d’affaires des IFF.

Nous savons que le volume de prêts à RPR élevé a diminué récemment à mesure que les taux d’intérêt ont grimpé. Il s’agit d’une bonne nouvelle qui était attendue. Nous voulons examiner l’adéquation et la viabilité continues de notre cadre réglementaire à la lumière de notre expérience de la pandémie et des approches employées par d’autres administrations.

Nous remercions les prêteurs pour leurs analyses des prédicteurs de défaut et nous convenons que la cote de crédit et d’autres facteurs peuvent être de meilleurs prédicteurs qu’un RPR ou un RDR élevé. Cela dit, un taux élevé d’endettement des ménages reste pertinent pour le risque de crédit, de même que pour la sûreté et la solidité des IFF et la stabilité globale du système financier. Dans un environnement favorable où les taux d’intérêt sont faibles, il est plus facile d’assurer le service de la dette élevée des ménages, ce qui peut occulter le véritable risque pour les emprunteurs et les prêteurs jusqu’à ce que les conditions changent. L’endettement, hypothécaire et autre, des ménages a continué d’augmenter ces dernières années en dépit des mesures existantes.

Restrictions relatives à la couverture du service de la dette

Commentaires

Les répondants sont partagés :

  • ils appuient une limite d’amortissement admissible;

  • la plupart s’opposent à des limites réglementaires et à l’harmonisation avec les critères des prêts hypothécaires assurés;

  • ils souhaitent préserver les limites et les critères déterminés par le prêteur et fondés sur le risque pour établir le coefficient d’amortissement de la dette.

Solutions de rechange proposées

Les propositions des répondants vont de limites du RPR/RDR plus normatives et plus claires à des approches plus souples. Plus particulièrement :

  • Le BSIF devrait adopter les limites du RPR/RDR des prêts assurés (39 %/44 %), mais seulement pour les emprunteurs non assurés, conformes et admissibles au taux préférentiel. Une tranche d’exception (20 %, p. ex.) sur le flux des prêts à RPR/RDR élevé pourrait s’appliquer aux emprunteurs présentant des attributs compensatoires (une cote de crédit plus élevée, p. ex.).

  • Le BSIF devrait adopter des formules et des définitions cohérentes pour les RPR/RDR des prêts assurés tout en tenant compte des différences sur le plan du risque entre le marché des prêts assurés et celui des prêts non assurés pour établir les limites.

  • Au lieu d’appliquer des limites normatives, le BSIF devrait favoriser la gradation fondée sur des principes des limites du RPR/RDR en fonction de la propension de l’IFF en cause à prendre des risques.

Réponse du BSIF

Nous croyons que l’application d’une limite d’amortissement explicite et admissible par les prêteurs a du mérite, et nous continuerons d’évaluer cette proposition. Une telle limite rendrait le calcul du service de la dette admissible plus rigoureux sans pour autant empêcher les prêteurs d’offrir une période d’amortissement contractuelle plus longue à certains emprunteurs admissibles.

Ayant examiné de près les commentaires des intervenants, nous reconnaissons qu’il ne convient pas d’appliquer des limites réglementaires à la couverture de la dette. Bien que ces limites puissent donner lieu à plus de cohérence, elles élimineraient une trop grande part du processus décisionnel fondé sur le risque et de la prise en charge des risques par les prêteurs. Bien que des limites claires s’appliquent aux prêts hypothécaires assurés, en vertu de la loi, elles servent généralement d’autres objectifs de politique publique au‑delà de la solidité prudentielle et de la stabilité financière. Une attente renforcée reposant sur des principes pourrait donc mieux convenir.

Simulations de crise sur l’abordabilité des taux d’intérêt

Commentaires

De façon générale, les répondants n’appuient pas les adaptations proposées du TAM et les critères d’abordabilité semblables. Les préoccupations touchent les répercussions négatives sur d’autres objectifs de politique publique et les conséquences imprévues.

Solutions de rechange proposées

Certains intervenants ont donné leur avis sur la façon dont le TAM et les critères semblables devraient être adaptés :

  • La conception du TAM devrait être plus dynamique et favoriser les périodes d’amortissement plus longues, ou au moins décourager l’offre de prêts à taux variable ou ajustable.

  • Les critères d’abordabilité devraient tenir compte des dettes autres qu’hypothécaires.

  • Le renouvellement avec transfert direct des prêts non assurés à un nouvel emprunteur (sans augmentation du montant ou de la période d’amortissement du prêt) ne devrait pas être soumis au TAM.

Réponse du BSIF

Nous sommes heureux de l’étendue de la rétroaction sur cette mesure. Nous continuerons de réfléchir à la meilleure façon d’encourager les prêteurs à appliquer des critères d’abordabilité plus rigoureux, surtout lorsqu’une demande de prêt hypothécaire comporte des attributs à risque plus élevé. Nous devrions alors pouvoir constater une variation des ratios de service de la dette admissibles.

Le fait d’encourager les périodes d’amortissement plus longues et des paiements plus stables par l’entremise de la conception du TAM a du mérite du point de vue de la gestion du risque. Cela se reflétait dans une version du TAM antérieure à 2018 qui exemptait les prêts à taux fixe à échéance de cinq ans ou plus. En contrepartie d’un tel incitatif, les produits à taux fixe et à plus long terme ne sont peut‑être pas le meilleur choix pour les emprunteurs pour des motifs autres que le risque.

Lorsqu’un emprunteur choisit de changer de prêteur, un nouveau prêt est établi. Par conséquent, nous nous attendons à ce que le prêt soit entièrement souscrit, ce qui comprend l’application du TAM aux prêts hypothécaires non assurés pour évaluer l’abordabilité de la dette étant donné que le prêteur doit effectuer sa propre vérification préalable puisqu’il assumera le risque de crédit associé à un prêt non assuré.En revanche, les emprunteurs assurés sont exemptés de l’application préalable du TAM lorsqu’ils changent de prêteur lors du renouvellement parce que leur risque de crédit a été transféré à l’assureur hypothécaire pour la durée du prêt. Pour éviter de déplacer les emprunteurs non assurés au moment du renouvellement, nous ne nous attendons pas à ce que le TAM soit appliqué de nouveau si le prêt est renouvelé auprès du même prêteur. Cela se justifie également sous l’angle du risque parce que le prêteur actuel a déjà effectué sa propre vérification préalable. Le fait d’exempter tous les renouvellements avec transfert direct de l’application du TAM pourrait inciter les prêteurs à se faire concurrence pour des prêts qui ne répondent pas aux attentes du BSIF. Nous continuons de surveiller les preuves de taux non concurrentiels pour les emprunteurs qui ne sont peut‑être pas en mesure de changer de prêteur, et nous interviendrons si nécessaire. Nous nous attendons aussi à ce que les prêteurs se conforment à la législation et aux consignes visant la protection des consommateurs.

Impact conjoint et ordonnancement des propositions

Commentaires

Dans l’ensemble, les répondants estiment :

  • que l’impact conjoint des mesures nuirait à la tarification concurrentielle et à l’accès au crédit, et pourrait favoriser la migration vers le secteur du crédit non réglementé;

  • que, si le BSIF envisage d’instaurer plusieurs mesures, elles devraient être mises en place progressivement et dans un ordre précis;

  • que, du point de vue de l’ordonnancement, les mesures de couverture du service de la dette devraient être prioritaires; viendraient ensuite les ajustements du TAM puis, enfin, la limitation du RPR;

  • qu’il ne faudrait pas envisager de mesures liées au cadre de fonds propres.

Solutions de rechange proposées

Certains répondants sont d’avis que le BSIF pourrait prioriser d’autres mesures, comme le renforcement des consignes de souscription des types de prêts à risque de taux d’intérêt plus élevé et le risque prudentiel découlant du crédit à la consommation non hypothécaire (cartes de crédit, prêts automobiles, etc.).

Réponse du BSIF

Nous convenons que l’impact cumulatif de multiples mesures pourrait avoir des conséquences négatives imprévues. Nous établirons donc l’ordre et la priorité de nos mesures portant sur le service de la dette.

Nous accorderons aux IFF un délai de mise en œuvre suffisant pour qu’elles apportent les modifications nécessaires à leurs systèmes et à leurs processus internes dans la foulée des mesures de surveillance. Pendant ce temps, nous continuerons d’étudier les mérites de certaines autres mesures de service de la dette soulevées dans le cadre de cette consultation à mesure que nous terminerons notre examen de la ligne directrice B‑20.

Nous n’entendons pas émettre de consignes réglementaires sur les expositions au crédit non hypothécaire des particuliers pour le moment. Nous convenons toutefois que le risque à ce chapitre s’est accru et qu’une surveillance continue s’impose.

Autres thèmes

Commentaires

Les répondants ont soulevé d’autres thèmes dans leurs interventions, y compris :

  • l’importance d’une meilleure vérification du revenu pour contrer les fausses déclarations en lien avec le crédit hypothécaire;

  • le rôle de premier plan d’une offre inadéquate de logements et d’une forte croissance démographique à titre de facteurs de l’augmentation des prix des maisons et de la dette des ménages;

  • le ciblage géographique des mesures proposées pour viser les marchés les plus à risque.

Solutions de rechange proposées

Le BSIF devrait travailler avec ses partenaires fédéraux afin de permettre la vérification indépendante du revenu par l’entremise de l’Agence du revenu du Canada (ARC).

Le BSIF pourrait limiter les répercussions imprévues de ses propositions en les faisant porter sur les marchés à risque plus élevé comme le Grand Toronto et le Grand Vancouver.

Réponse du BSIF

Nous accueillons avec plaisir toute initiative qui met de l’avant le fait qu’en vertu de la ligne directrice B‑20, nous nous attendons à ce que les IFF utilisent des sources de revenus qui sont vérifiables de manière indépendante et difficiles à falsifier. Tout comme nos partenaires fédéraux du secteur financier, nous sommes au courant des efforts de l’ARC à cet égard.

Nous sommes d’avis que les déséquilibres du marché de l’habitation sont attribuables à des facteurs liés à la demande et à l’offre. L’offre adéquate de logements qui suit les besoins liés à la démographie favorise le bon fonctionnement et la stabilité du marché des prêts hypothécaires et de l’économie canadienne dans son ensemble.

Nous savons que les risques liés au logement sont souvent plus importants dans les grands centres urbains. Nous n’entendons toutefois pas instaurer de mesures à caractère territorial parce que bon nombre de vulnérabilités, de déclencheurs et de risques liés au logement (hausse des taux d’intérêt, fort endettement des ménages, inflation des dépenses, etc.) sont présents, quel que soit le territoire. De plus, certaines mesures réglementaires existantes sont automatiquement plus contraignantes dans les territoires caractérisés par des attributs de risque plus élevés. Enfin, de telles mesures ciblées sont susceptibles de provoquer des déplacements et une migration du risque vers des territoires adjacents.